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les différents types de banques
21 mars 2007

Les cyberbanques

L’échec de la banque « tout internet en France »

Depuis quelques années les nouvelles technologies et notamment Internet connaissent un essor considérable. Il s’agit aujourd’hui d’un phénomène de société. Selon l’INSEE, en 2005, presque 45% des foyers français disposent d’un accès à Internet.

Le secteur bancaire s’est donc tout naturellement interrogé sur l’utilisation de ce canal de distribution en vue de proposer ses services et produits.

Les banques traditionnelles se sont alors mises à proposer des services en ligne, principalement la consultation et gestion de compte en ligne. En parallèle d’autres acteurs financiers ont envisagé de proposer l’ensemble des services d’une banque sur Internet, sortant ainsi du mode de distribution traditionnel Ce nouveau concept est appelé cyberbanque ou banque tout internet.

Au travers de la banque tout internet Egg nous allons essayer de comprendre pourquoi ce concept n’a pas su s’imposer sur le marché français. Pour cela nous verrons tout d’abord si ce concept répond à un besoin, puis nous nous intéresserons au cas d’Egg avant de voir les différentes limites de la cyberbanque.

1)   Un nouveau besoin

Le développement important d’Internet a apporté de nombreux changements dans les habitudes de consommation, entraînant de nouveaux besoins. Ainsi les relations entre personnes se sont « virtualisées ».

Grâce à Internet de nombreux services se retrouvent accessibles sans bouger de chez soi, avec un gain de temps pouvant être important. Ainsi, dans le domaine bancaire, cela s’est traduit par un besoin de rapidité dans l’exécution des prestations bancaires : avec Internet, plus besoin de se déplacer en agence et de retrouver les contraintes qui en découlent, notamment les files d’attente.

Ainsi depuis chez lui le client peut consulter son compte, effectuer des virements, souscrire de nouveaux produits, éditer des RIB et des états de compte, commander et faire opposition sur des chèques et tout cela à de meilleurs tarifs qu’en agence, passer des ordres en bourse.

Le client devient ainsi son propre gestionnaire. De plus la banque en ligne se retrouve « ouverte » 24h/24, 7j/7.

Mais le consommateur n’est pas le seul à pouvoir trouver un avantage dans la banque en ligne. Côté banque les coûts s’en retrouvent diminués, d’environ 50% dans de nombreux cas par rapport au même service proposé en agence. Cela peut également permettre d’éviter d’ouvrir certaines agences et de faire face à des problèmes de localisation dans les villes.

Au travers d’Internet les cyberbanques touchent une clientèle différente de celle traditionnelle en agence. Ce sont plutôt les jeunes et les cadres dynamiques, utilisant beaucoup les nouvelles technologies qui sont visés.

Nous allons maintenant voir comment cela s’est passé dans la réalité avec l’exemple de la banque Egg en France.

2)   La cyberbanque Egg

Implantée à l’origine en Grande-Bretagne Egg opère entièrement sur Internet en proposant l’ensemble de ses produits et services en ligne. Cette cyberbanque compte aujourd’hui plus de 3 millions de consommateurs dont 2,5 millions porteurs de la carte Egg. Le bénéfice avant impôt dépasse les 80 millions d’€. Au niveau européen la banque a une part de marché de plus de 30% dans le domaine de la banque en ligne. C’est donc logiquement qu’Egg a voulu étendre sa zone de chalandise dans l’Europe et notamment en France.

Pour son lancement français Egg a articulé sa stratégie autour de 2 axes : des campagnes de publicité provocatrices et la carte de paiement comme produit d’appel.

La carte se différencie de ce qui se fait chez la concurrence par ce que l’on appelle le cash-back, principe visant à rétrocéder au client 1% de tout achat réalisé avec la carte.

C’est le 02 novembre 2002 que la filiale française est lancée avec pour ambition de devenir une banque complémentaire proposant de nouveaux services en supplément de la banque principale du client. Côté communication l’agence de communication BBDP a diffusé 2300 spots, 7,5 millions d’encarts presse, 320 000 mailings et 100 000 sms entre autre, représentant une dépense importante.

En l’espace d’un mois d’existence, la banque revendiquera l’ouverture de 50 000 ouvertures de compte et des revenus annuels moyens supérieurs de 30% à la moyenne française (environ 50 000€).

A priori ce concept aurait donc dû marcher, étant source d’innovation et se plaçant sur un créneau peu exploité par le réseau bancaire traditionnel. Mais Egg France n’a pas réussi son pari. A peine deux ans après son lancement la filiale française est cédée à

la Banque Accor

(Groupe Auchan) après avoir subi des pertes de 69 millions d’€ en 2003, convaincu seulement 130 000 clients et ainsi plombé considérablement les résultats de Egg Grande-Bretagne.

Nous allons donc voir pourquoi la banque « tout internet » n’a pas su s’imposer durablement en France.

3)   Les raisons de l’échec

-         Limites techniques :

La dématérialisation est difficile à mettre en place, notamment sur un plan juridique. En effet, sur Internet, la preuve de signature (même électronique) est difficile voire impossible à prouver. Pour une caution par exemple, la signature est obligatoire, la banque traditionnelle est donc pour le moment irremplaçable pour certains actes.

Une autre limite est le fait que seulement 26 millions de français utilisent Internet, ce qui laisse de côté un bon nombre de clients sachant que la possession d’un compte bancaire est aujourd’hui devenu indispensable voire obligatoire. La contrainte est donc importante.

De plus, le développement d’Internet s’accompagne aujourd’hui d’une cybercriminalité (phishing), crainte par les populations et entraînant donc une réticence importante à réaliser des opérations bancaires en ligne.

-         Limites culturelles :

Egg a voulu proposer le modèle anglo-saxon et qui avait donc fait ses preuves en Grande-Bretagne, malheureusement les différences culturelles et de mœurs ont montré qu’il s’agissait d’une erreur marketing.

L’argent est en France un sujet tabou, et l’utilisation d’Internet pour tout ce qui touche à l’argent entraîne une méfiance. On peut donc comprendre pourquoi les français puissent difficilement accepter de gérer leur compte uniquement à partir d’un support virtuel.

L’idée de ne pas avoir de trace matérielle et de ne pas savoir à qui on fait face est une barrière que les mentalités françaises n’ont pas encore franchie.

De plus, l’activité de conseil occupe encore une place dominante au sein des banques, chose que l’on ne retrouve pas dans la gestion virtuelle.

-         Limites concurrentielles :

Dès le début des années 2000 les banques traditionnelles ont intégré les nouvelles technologies et se sont tournées vers le « home banking », permettant aux clients d’effectuer depuis chez eux (internet, téléphone, …) les opérations de bases de leur compte sans pour autant enlever les relations avec leur conseiller et l’accueil en agence.

Une étude de Novamétrie révèle que seulement 16% des français seraient prêts à changer de banque pour une cyberbanque.

graphique

Ce graphique tiré de l’ouvrage Marketing et Stratégie de

la Banque

aux Editions Dunot montre clairement que si les français sont prêts à se détourner du canal classique de distribution de la banque (en agence) pour des opérations simples ils sont encore très réticents en ce qui concerne les opérations importantes nécessitant conseil comme les crédits par exemple.

-         Limites démographiques :

En ce qui concerne l’utilisation des nouvelles technologies l’âge est un des facteurs dominants. « La génération Internet » est encore jeune, et la population française a tendance à vieillir. Et pour bon nombre de personnes âgées le monde d’Internet est une « jungle »  et il s’agit donc d’un outil qu’ils ne maîtrisent pas. Cela retire donc aux cyberbanques un secteur important de clients potentiels et particulièrement rentable.

Comme nous avons pu le voir, malgré une offre intéressante et pouvant répondre à un nouveau besoin, la banque Egg et les cybebanques en général n’ont pas réussi à convaincre et gagner la confiance des consommateurs français. Peut-être est-il encore un peu tôt en en terme de génération pour qu’one telle offre puisse se développer.

De plus les banques traditionnelles françaises, particulièrement performantes, ont su rapidement intégrer les nouvelles technologies en plus de leur offre traditionnelle dans leur stratégie de distribution, barrant ainsi la route aux banques tout internet.

L’alliance du « home banking » et d’une banque traditionnelle semble donc le modèle le mieux adapté au marché français.

Bibliographie :

Banque de France

Marketing et stratégie de la banque aux Editions Dunot

www.linternaute.com

www.wikipedia.org

www.journaldunet.com

Banque Magazine article « La banque tout internet a un avenir » (n°621)

Challenges articles sur Egg

www.aecom.org

www.laviefinanciere.com

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